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Friday, May 13, 2011

APPEL À CONTRIBUTIONS : Le laïc et le religieux dans l’action humanitaire

APPEL À CONTRIBUTIONS : Le laïc et le religieux dans l'action humanitaire

A contrario
Revue interdisciplinaire de sciences sociales

Les auteur-e-s devront prendre contact avec les coordinateurs du numéro,
Jamie Furniss (jamie.furniss@mom.fr) et à Daniel Meier
(daniel.meier@graduateinstitute.ch), pour soumettre leur projet (titre et
résumé d'une page, accompagnés de leur nom, coordonnées, affiliation
institutionnelle) avant le 10 juin 2011.

[Argumentaire]

Les organisations motivées par la foi (organisations d'origine
confessionnelle, ou « ONGc ») jouent un rôle majeur et, semble-t-il,
croissant dans l'action humanitaire et le développement international
(DURIEZ, et al. 2007). Elles aident ainsi à fournir des services de base
et à défendre les droits fondamentaux des réfugiés soudanais au Caire,
elles fournissent des soins et assurent le traitement du VIH/SIDA en
Afrique subsaharienne, elles distribuent les denrées alimentaires fournies
par le Programme Alimentaire Mondial (PAM) des Nations Unies... Ceci n'est
pas l'apanage exclusif des organisations confessionnelles chrétiennes : du
Secours Islamique à Islamic Relief Worldwide, les ONG islamiques (GHANDOUR
2002), ainsi que celles d'autres confessions, participent pleinement à cet
essor bien que, pour le moment, elles soient moins connues et étudiées. La
question du moins épineuse et possiblement embarrassante de savoir si la
culture et l'idéologie chrétiennes, en mettant l'accent sur la charité,
l'initiative individuelle, et la construction d'institutions, soient en
plus grande congruence avec la participation aux activités de l'ONU et à
l'action humanitaire est désormais posée (BERGER 2007: 37).

Peut-on pour autant présupposer une distinction entre les catégories de
laïc et de religieux en reprenant cette nomenclature (ONG vs. ONGc) ?
Cette grille d'analyse est-elle réellement pertinente et opératoire ? La
solidarité internationale, l'action humanitaire et l'aide au développement
tels que nous les connaissons aujourd'hui, avec leur vocation universelle
de l'achèvement de l'être humain, sont en grande partie l'aboutissement
d'une « sécularisation de l'utopie missionnaire en utopie du développement
» (PRUDHOMME 2007: 66). Cette sécularisation a accompagné les mutations
des relations Nord-Sud après la chute de l'ordre colonial (ESCOBAR 1995)
et la transformation du concept de mission à l'issue du concile de Vatican
II (CHEZA, et al. 1999). Depuis la décennie 1990 et la rhétorique en vogue
de « bonne gouvernance », la mention de « société civile » est devenue une
formule quasi-incontournable pour bénéficier du soutien de la communauté
internationale (FERJANI 2008), contribuant à un « re-branding » de
l'activité religieuse, c.-à-d. à un changement de son image marketing. Ce
virage avait déjà été amorcé avec la valorisation de l'aide technique, des
activités économiques et des œuvres sociales comme piliers de la mission
et avec l'implication de personnel laïc dans l'action missionnaire. Le
prosélytisme a progressivement été relégué au second plan au profit de la
lutte contre le « sous-développement », devenu un motif autonome
d'engagement pour les fidèles, voire un devoir qui participe de la foi. Au
cours de la deuxième moitié du XXe s., la terminologie missionnaire a été
supplantée par un champ lexical tiers-mondiste.

Sous un autre angle, le « développement », au sens large de « progrès»,
traduit les croyances eschatologiques de notre ère (LATOUCHE 2004)
constituant un de ses grands récits et s'apparentant sur le plan
sociologique à ce qu'a pu être la religion à d'autres époques. Selon
HOPGOOD (2006), le militantisme des partisans des droits de l'homme peut
être lu comme une forme de religion séculaire (« human-rights activism is
a social practice best understood as a secular religion »). Cette analyse
pourrait s'appliquer à un large éventail d'activités liées à l'humanitaire
ou au développement. Une « approche intégrée » croisant religion et
développement s'annonce féconde mais elle reste peu explorée, malgré
l'appel lancé dès 1988 par
Philip Quarles van Ufford et Matthew Schoffeleers dans Religion and
Development: Towards an Integrated Approach.

Bref, une frontière tracée a priori entre l'action pour le « développement
», d'une part, et l'action « missionnaire », d'autre part—la première
étant naïvement estimée laïque, la seconde comme hors du champ des
development studies—est démentie par l'expérience de terrain qui défait
sans cesse cette frontière, montrant la fluidité des identités des acteurs
et le passage de l'un à l'autre type d'action, voire leur chevauchement.

C'est précisément cette fluidité des catégories qu'il faut interroger afin
d'essayer de mettre en évidence d'autres distinctions qui permettront de
répondre à la question comment les ONGs et la société civile laïques se
distinguent-elles des organisations confessionnelles ?

- d'un point de vue théorique, observe-t-on une distinction en matière de
motivations et de valeurs ? Quelles sont la source et la nature de
l'engagement, ainsi que le projet de réforme sociale et individuelle ?

- d'un point de vue historique, quelles sont les continuités et les
ruptures entre l'action missionnaire et l'aide au développement ?

- sur les plans pratique et fonctionnel, leurs réseaux de recrutement et
leur « staff » sont- ils différents? Qu'en est-il de la nature de leurs
interventions et leur mode de travail ? En termes de financement, leurs
sources divergent-elles ?

Références bibliographiques :

Berger, J. (2007). « Les organisations non gouvernementales religieuses.
Quelques pistes de recherche ». Les ONG confessionnelles. Religions et
action internationale. B. Duriez et al. Eds. Paris, L'Harmattan: 23-40.

Cheza, M., et al., Eds. (1999). Nouvelles voies de la mission, 1950-1980.
Actes de la session conjointe du CRÉDIC (XVIIIe session) et du Centre
Vincent Lebbe Gentinnes 1997. Lyon, CRÉDIC.

Duriez, B., et al., Eds. (2007). Les ONG confessionnelles. Religions et
action action internationale. Collection Religion en questions. Paris,
L'Harmattan.

Escobar, A. (1995). Encountering development: The making and unmaking of
the Third World. Princeton, Princeton University Press.

Ferjani, M.-C. (2008). « Usage de la « société civile » dans les pays
arabes à travers l'exemple tunisien ». Mouvements civils et mobilisation
sociale en Méditerrannée aujourd'hui. Communication au Colloque de
l'Università Ca' Foscari Venezia, Campo Santa Margherita, 5 mars 2008.

Ghandour, A.-R. (2002). Jihad humanitaire. Enquête sur les ONG islamiques.
Paris, Flammarion.

Hopgood, S. (2006). Keepers of the flame: Understanding Amnesty
International. Ithaca, N.Y. ; London,
Cornell University Press.

Latouche, S. (2004). Survivre au développement : De la décolonisation de
l'imaginaire économique à la
construction d'une société alternative. Paris, Mille et une nuits.

Prudhomme, C. (2007). « De la mission aux ONG de solidarité
internationale. Quelle continuité ? » Les ONG confessionnelles. Religions
et action action internationale. B. Duriez et al. Eds. Paris, L'Harmattan:
55-70.

Quarles van Ufford, P. et J. M. Schoffeleers (1988). Religion &
Development: Towards an Integrated Approach. Amsterdam, Free University
Press.

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